Si on se faisait un petit bol de beauté ? (I)

Après avoir bricolé quelques premiers accessoires simples mais bien utiles pour nos flashes portables, nous allons à présent nous attaquer à quelque chose d'un rien plus ambitieux: la fabrication d'un bol de beauté à partir de matériaux très bon marché et très standards.
Ce tutoriel est divisé en deux parties. La première ci-dessous reprend le détail des explications relatives au montage lui-même. La seconde - à venir - comparera les résultats obtenus en termes d'éclairage entre notre bol de beauté maison et un accessoire standard dans le commerce qui est le parapluie dit "shoot-through", aussi connu sous le nom de parapluie translucide. Accrochez-vous, c'est parti pour un petit tour du côté de l'univers des éclairages.

Si vous êtes familier avec l'éclairage de studio, vous savez sans aucun doute ce qu'est un bol de beauté. Si ce n'est pas le cas, on pourrait résumer en disant qu'il s'agit d'une sorte de grande soucoupe (jusqu'à près de 1 mètre de diamètre) munie en son centre d'un réflecteur. La lumière entre par l'arrière de la soucoupe, rebondit tour à tour sur le réflecteur puis sur la partie interne de la soucoupe, avant d'enfin aller atterir sur le sujet que vous tentez d'éclairer. Ce type d'accessoires est fort apprécié par certains photographes, car il donne une lumière plus douce que celle obtenue à l'aide d'un parapluie mais plus contrastée que celle fournie par une boîte à lumière de même dimension. Il est recherché en portrait (de mode surtout) parce qu'il permet, paraît-il, d'obtenir des micro-constrates difficiles à obtenir avec d'autres modeleurs. Il est moins encombrant qu'une boîte à lumière dépliée, mais reste plus lourd bien entendu qu'un parapluie. Une chose le caractérise : il est coûteux pour un modèle de dimension honorable (au-delà de 50 cm de diamètre). C'est la raison pour laquelle beaucoup de tutoriaux existent déjà quant à la meilleure manière de s'en fabriquer un, avec des degrés de succès et de complexité assez variables. Pour notre part, nous allons nous diriger vers un modèle tournant aux alentours de 50 cm de diamètre, pour un coût et un poids quasi imbattables dans cette gamme de dimensions.

Ce dont vous aurez besoin est pour l'essentiel : une soucoupe que l'on place sous les pots de fleur de grande taille, une assiette en plastique et une demi-sphère. La soucoupe fait ici 52 cm de diamètre (le maximum disponible je pense) et est réalisée dans un plastique rigide; elle est aisément trouvable dans tout magasin de jardinage pour quelques euros. L'assiette est tout aussi bon marché, moulée dans un plastique solide. Quant à la demi-sphère, il s'agit ici de l'emballage de ces jouets pour enfants que l'on trouve dans des distributeurs à la sortie des magasins. Comptez deux euros pour le jouet et la boule; refilez le jouet à vos enfants et gardez la partie la plus précieuse en ce qui vous concerne, vous ferez ainsi deux bonnes actions en un seul achat. Il vous faut enfin des tiges filetées d'environ 20 cm de longueur (5 mm de diamètre ici) avec les écrous qui vont avec. Coût total: de l'ordre de 12 euros, à la grosse louche. D'autres choses vous seront aussi nécessaires : un morceau de latte en aluminium, un bout de chambre à air de vélo, du papier de verre et de la peinture (métallisée et blanche).

Commencez par effectuer une découpe grossière dans la soucoupe en son centre (utilisez un couteau chauffé ce qui vous permettra ensuite de finir la découpe très proprement à l'aide d'un cutter ou équivalent). Vous allez ensuite devoir percer trois trous disposés en triangle équilatéral dans la soucoupe et dans l'assiette, ayant le même diamètre que celui de vos tiges filetées, en étant très soigneux pour que la disposition de ces trous soit la plus identique possible sur l'assiette et la soucoupe. Ceci vous permettra d'avoir au final des tiges filetées qui resteront parralèles autant que possible à la fin du montage.

Percez ensuite un trou au centre de l'assiette et au centre de la demi-sphère. Mesurez la hauteur de la demi-sphère et récupérez sur l'une de vos tiges filetées cette longueur avec une marge supplémentaire de 1.5 cm. Placez la demi-sphère dans l'assiette et serrez le tout à l'aide du morceau de tige que vous avez découpé. L'esemble assiette et demi-sphère constituera la partie réflecteur de notre bol de beauté, vous l'aurez compris. Toute la surface située du côté de la sphère sera peinte à l'aide d'une peinture métallisée couleur chrome (faites bien attention à la couleur de cette peinture métallisée: prenez chrome et pas autre chose, sous peine de teinter sérieusement la lumière de votre flash).

Vous pouvez à présent fixer les tiges filetées de manière à pouvoir positionner l'assiette face à la soucoupe. Ne vous souciez pas trop pour l'instant de la distance exacte à laquelle l'assiette doit se trouver par rapport à la soucoupe: il va vous falloir effectuer de nombreux tests pour cela, tout étant fonction de la taille de la boule, de celle de l'assiette et d'autres paramètres liés à votre flash. Nous y reviendrons plus tard. Contentez-vous pour l'instant de serrer un peu tous ces écrous afin de vérifier si l'ensemble est raisonnablement bien aligné. Si c'est le cas, vous avez bien travaillé (notez que sur la photo les écrous ne sont pas encore serrés, ce qui donne un air penché à l'ensemble). Pour régler plus tard la hauteur de l'assiette, il vous suffira de positionner les 6 écrous (trois au-dessus et trois en dessous) permettant de coincer l'assiette à la hauteur voulue.

Il nous faut à présent passer à la partie arrière de la soucoupe, afin de prévoir un système de fixation pour le flash. Le plus simple est de découper un morceau de latte en aluminium que vous allez plier en angle droit (utilisez un étau ou à defaut le bord d'une table). Si vous le pouvez, fermez un rien l'angle pour qu'il soit de l'ordre de 85° plutôt que 90° si la latte est légèrement flexible. La raison est que, sous le poids de la soucoupe et en raison de l'élasticité de l'aluminium, l'angle formé sera un rien plus ouvert lorsque vous utiliserez le bol en conditions réelles. Fermer donc un peu plus vous permettra d'avoir les 90° attendus lors de son utilisation. Pour la fixation, percez simplement des trous dans la soucoupe et dans le morceau de latte, le tout étant fixé à l'aide de deux boulons. Percez un trou supplémentaire qui vous permettra de passer au travers le spigot destiné à fixer le flash en place. Remarquez aussi le bout de chambre à air fixé sur la latte, qui augmentera l'adhérence et évitera que le flash ne tourne trop facilement autour de l'axe du spigot.

La question délicate qui reste en suspens est : quelle dimension pour la latte ? Là, tout dépend de votre matériel. Considérez que la tête du flash devra être engagée de quelques mm dans la soucoupe et qu'elle devra être la plus centrée possible. Vous pouvez voir sur la photo ce que donne le montage dimensionné pour accueillir un fash canon 580 EX II placé au sommet d'un récepteur cactus V4, le tout étant fixé à l'aide d'un spigot Manfrotto. Si vous êtes du genre très prévoyant, vous pouvez effectuer une saillie en lieu et place des deux trous de fixation, ce qui vous permettra au besoin de régler la hauteur du flash par rapport à la soucoupe. Notez enfin que le montage n'exerce aucune pression sur le flash: c'est la latte métallique qui supporte l'ensemble du poids, évitant ainsi d'exercer une flexion potentiellement dangereuse sur le flash. C'est une très bonne chose.

Nous avons presque fini. A présent nous pouvons tout démonter et passer à la phase de la peinture. Toute la surface intérieure de la soucoupe et la demi-sphère doivent être rendues les plus réfléchissantes possibles, et l'on obtient un résultat très satisfaisant à l'aide d'une peinture métallisée. Prévoyez au moins trois couchez : au plus de couches il y a, au plus la surface sera lisse et réfléchissante. N'oubliez pas de poncer légèrement toutes les surfaces au préalabe pour augmenter l'adhérence de la peinture, qui risque d'éclater et de se détacher au moindre choc dans le cas contraire. Pour la soucoupe et la partie arrière de l'assiette, utilisez de la peinture blanche (là aussi, blanc de chez blanc et pas autre chose, sous peine d'obtenir une lumière teintée). Prenez une peinture mate ou satinée, sachant que la satinée renverra plus de lumière mais aussi une lumière moins douce. Afin de donner un look très professionnel à l'ensemble, peignez aussi l'arrière de la soucoupe en noir mat et vous n'aurez dès lors plus aucune raison de paraître ridicule ni d'être dévisagé le jour où, lors d'une séance en extérieur, vous installerez votre soucoupe pour pot de fleur au bout d'un pied.

Voilà, nous avons terminé et voici à quoi ressemble notre montage final (tiges filetées toujours non coupées, car nous allons devoir encore effectuer nos réglages). Nous allons malgré tout avant la phase de test en conditions réelles effectuer quelques essais quant à l'homogénéité de la lumière sur la soucoupe. A cette fin, toutes les photos suivantes ont été prises à raison d'une diminution d'un EV lors de la prise de vue (en clair, vous diminuez à chaque fois de moitié la lumière reçue par le capteur de votre appareil photo). Les résultats ne sont pas mauvais. Bien entendu, impossible d'avoir une homogénéité parfaite à la surface de la soucoupe a priori, mais en fermant le diaphragme on constate que la différence d'éclairage entre les différentes parties de la soucoupe n'excède pas l'effet de l'ombre portée par les tiges filetées. Quand on sait que les bols de beauté professionnels utilisent eux aussi ce systeme de montage sur des tiges, on peut penser que ce n'est pas mal du tout. Il sera difficile de faire beaucoup mieux, tout simplement parce que notre soucoupe est plate alors que la forme du réflecteur et du fond d'un vrai bol de beauté sont bien entendu calculés pour que la lumière soit parfaitement homogène, ce qui explique aussi leur coût. Petit bonus pour notre bricolage : tout est très asément démontable et ne prendra que très peu de place une fois rangé car tout est assez plat. Pour plus de facilité, vous pouvez même monter des écrous papillons qui vous permettront un montage-démontage encore plus rapide.


Bien que tout semble OK jusqu'à présent, il reste à voir comment notre bol de beauté se comporte lorsqu'il éclaire un sujet, ainsi que de comparer le résultat avec celui du traditionnel parapluie translucide. Ces points constitueront la seconde partie de ce tutoriel, mais d'ici là vous avez de quoi faire.

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