Le parapluie est à la photographie ce qu'est le double cheeseburger à la gastronomie: rapide, pas cher, facile à trouver, mais pas forcément le sommet de ce que l'on peut espérer dans le domaine. Pour le photographe de terrain, il a le très grand avantage de pouvoir être rapidement et facilement mis en place. A ce niveau, il offre donc un compromis acceptable pour qui ne veut pas déployer des boîtes à lumières, ce qui n'est pas toujours très commode, à plus forte raison si ces boîtes dépassent une taille de 60 cm. On peut cependant améliorer un peu les choses à faible coût. Certes, ce ne sera jamais une vraie boîte à lumière, mais ça commencera à y ressembler. Autant se faire plaisir sans entamer ses économies.
Le problème de l'éclairage au parapluie est qu'il est presque incontrôlable tant la lumière est jetée dans toutes les directions, de la façon la plus désordonnée qui soit. Et pour ce qui est de l'homogénéité de cette lumière, difficile de faire pire, comme on peut le constater sur la photo d'entrée de ce billet. Pour les éclairages fins, peu d'espoir. Faut-il pour autant passer à quelque chose de beaucoup plus cher et de bien plus encombrant à mettre en place ? Pas forcément, car on peut imaginer des compromis. C'est ce qu'une "brolly box" peut vous offrir. Une brolly box est un parapluie équipé d'une toile, à la manière d'une boîte à lumière, sauf qu'il s'agit toujours d'un parapluie à la base. On en trouve sur les sites de commerce en ligne, mais la qualité laisse parfois à désirer (dixit pas mal de clients ayant laissé un commentaire). Nous allons voir comment le fabriquer nous-même. C'est vraiment très simple.
Munissez-vous d'un parapluie argenté, en l'occurrence d'un diamètre de 90 cm pour l'expérience. Défaites votre lit et coupez à grands coups de ciseaux un carré d'environ 1,10 mètres de côté dans votre drap blanc. Commencez à faire un petit trou au milieu et placez-y un oeillet à river (de ceux que l'on utilise pour les bâches). Le diamètre intérieur de celui-ci doit être au moins égal au diamètre du manche du parapluie (mieux vaut vérifier avant, c'est clair). Si le parapluie dispose de 8 baleines, percez des trous après avoir tracé la position des sommets d'un octogone (un peu de géométrie comme à l'école) et munissez-les eux aussi d'oeillets. Veillez bien à ce que la distance de ces oeillets par rapport à l'oeillet central soit inférieure d'environ 2 cm, par comparaison avec la distance mesurée entre le bout d'une baleine et le manchon central du parapluie. Ceci vous permettra d'assurer que la toile est en tension quand sera en place. Montez ensuite la toile sur le parapluie, qui sera lui-même monté sur un pied avec le flash que vous comptez utiliser. Après avoir placé le flash contre la toile tendue, faites une découpe pour passer la tête du flash à juste à l'intérieur de la toile. Voici ci-dessous à quoi cela devrait ressembler une fois monté.
Pour fignoler et vous détendre, vous pouvez ensuite faire un peu de couture et réaliser un ourlet tout le long du contour (ce qui n'a pas été fait ici), afin d'éviter que les bords libres du tissu ne se mettent à filer après quelques manipulations. Maintenant, comparons l'éclairage du parapluie et celui de notre parapluie transgénique en faisant une photo volontairement sous-exposée.
L'homogénéité de la lumière n'est pas parfaite, mais c'est pas mal quand même. Il reste à voir ce que la toile nous fait perdre comme puissance lumineuse. Le flash (un Canon 580 EX II équipé de déclencheurs Cactus V5) a été déclenché à pleine puissance dans les deux cas, en veillant bien à mettre la tête du flash sur la position grand angle. Le flashmètre placé à un mètre de distance du plan formé par l'ouverture du parapluie donne comme mesure f/10 (à 100 ISO et 1/60s) pour le parapluie simple, tandis que l'on obtient f/8 (toujours 100 ISO et 1/60s) à un mètre de la toile du parapluie modifié. Cela représente donc moins d'un diaphragme de lumière perdue, ce qui paraît étonnant à première vue (on s'attendrait à perdre au moins un diaphragme). La raison est probablement liée au fait que la perte de lumière est en partie compensée par un faisceau de lumière plus étroit (et donc plus puissant). Pour le vérifier, les deux montages ont été retournés vers le fond, le plan de l'ouverture du parapluie/de la toile étant situé à 70 cm de distance de ce fond. Les deux photos (prises avec les même réglages dans les deux cas) montrent bien que le parapluie modifié permet d'assurer une lumière mieux contrôlée, avec un vignettage naturel bien plus plus régulier et rapide, tandis que la luminosité du fond au plus près des bords du parapluie semble à peine plus faible.
Donc, ça marche. Placer la toile sur le parapluie ne demande que quelques instants, tandis que la fabrication du tout ne coûte qu'une poignée d'euros. On pourra rendre l'apparence encore plus professionnelle en faisant de beaux ourlets sur le drap. Notez cependant que, contrairement à une boîte à lumière, il ne sera pas possible d'approcher le parapluie modifié aussi près de votre éventuel modèle, et ce en raison du manche du parapluie. Si après moults utilisations ce montage vous convient, vous pourrez toujours envisager de scier la partie de manche excédentaire, mais cette amputation radicale vous priverait alors d'un usage normal du parapluie. Rien n'est donc parfait même dans le plus parfait des mondes. A vous de voir si cela en vaut la peine.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire